Loin des combats d'arrière-garde d'une certaine critique, il continue, sans manière, de bousculer les règles de l'écriture. Son nouveau roman, "Sainte Bob", n'échappe pas à la règle. Pour évoquer ses trois derniers romans unis par des liens ténus, Djian en appelle à Melville... "Soyez fidèles aux rêves de votre jeunesse". Suit une longue digression sur les aspirations avortées, les siennes, celles des autres, ce que la littérature lui a pris, avec ce constat simplement lucide : "Quelque
part, on s'est tous filé un coup de fusil ". Il va, ainsi, parler
deux heures durant, de la vie, des existences qu'il épingle dans
ses livres étonnants et celles croisées au quotidien. La distance
entre les deux est infime. Philippe Djian ironise au passage sur ces distributions
de prix où son nom ne figure lamais. " On s'est plus intéressé
à l'image que je véhicule qu'à mon travail ". Difficile,
pourtant, de nier de quelle manière il a dépoussiéré
une littérature française figée dans une pseudo tradition.
Il faudrait revenir à la modernité de son écriture.
Un terme qui cadre mal pour expliquer une expression en phase avec l'époque,
ses audaces, ses vertiges. "Ecrivain rock", l'expression galvaudée
résume toutes les limites d'une critique érigée en
institution, devant ce qui l'étonne, échappe à ses
références étriquées. Lui se dit "classique".
"Mon attitude l'est. Etre seul fait partie de mon histoire, ma culture.
Kerouac l'était. Fante, Bukowski, Miller aussi". Il continue de vendre
à 300.000 exemplaires chacun de ses bouquins. Jean-Paul
GERMONVILLE L'Est Républicain - 12 juillet 1998 |