Nulle Part Ailleurs - Canal + - Mardi 16 juin 1998 - Retranscription
 
 Photos Yves Ganem 
Propos recueillis par Guillaume Durand

Pour un écrivain qui travaille tranquillement, installé dans le secret, aller à la télévision, ça doit être un peu casse... enfin pas facile.

Non, ça change. Ca fait plaisir. C'est toujours agréable d'avoir des gens qui sont autour de vous et qui vous font l'ovation qu'on m'a faite. Non, c'est plutôt agréable.Ca change, au bout d'un an.

La définition que vous avez en général d'un écrivain, c'est plutôt celle...

Oui, mais là, je suis pas l'écrivain, là...

Non, ceux que vous aimez... Ce sont plutôt des types genre ours mal léché, plutôt Jim Morisson planqué quelque part que Jean d'Ormesson qui en est à son 64.000 Apostrophes trouve qu'il y a des gens très bien qui viennent vous voir, donc c'est plutôt un honneur pour moi d'être là.

Nous allons parler de Sainte-Bob. Je disais tout à l'heure que c'était peut-être le point final d'une trilogie avec Assassins et Criminels. On va en parler avec Philippe, le temps de découvrir le sujet qui lui est consacré :

"Philippe Djian, c'est l'écrivain à moitié sourd de l'oreille droite mais visionnaire des deux yeux que le public a découvert non pas en librairie mais au cinéma en 1985 quand Yves Boisset adapte son premier roman "Bleu comme l'enfer" et surtout l'année suivante avec "37.2° le matin" de Jean-Jacques Beinex. Les droits du film et les prouesses de Béatrice Dalle lui permettent d'arrêter les petits boulots. Djian a été péagiste sur l'autoroute, magasin et même grand reporter guerillero en 1968 en Colombie avec Jérôme, le copain du lycée Turbot, avec qui il a découvert Faulkner, Hemingway, Salinger et la littérature américaine à l'époque où les français s'intéressaient plus à Françoise Sagan qu'à Jack Kerouac. C'est d'ailleurs à l'image du grand Jack que Philippe Djian prend la route. Avec le succès, il quitte la bergerie de Fitou, dans les Corbières, qu'il a bâtie entièrement de ses mains et s'installe à Biarritz, près de Bordeaux, à Boston, à Florence et aujourd'hui à Lausanne pour se rapprocher de son ami Stephan Eicher, le rocker helvétique pour qui il écrit des chansons qui cartonnent au hit parade. Bref, à près de 50 ans, Philippe Djian, reste l'unique prototype de l'écrivain rock and roll qui écrit comme les jeunes parlent et vit à Lausanne comme les vieux".