EXTRAITS 50 CONTRE 1


Toute une vie, parfois, ça pouvait être pas grand chose, comment on pouvait en arriver là ?

Henri était à la hauteur pour la rigolade et cette vieille gueule toute chiffonnée qui ne m'avait jamais adressé un sourire devenait si belle que j'en croyais pas mes yeux, la joie lui enlevait vingt ans, la mort reculait.

J'étais tombé sur une sirène sauf qu'il y avait des talons aiguilles au bout.

Un jour, ils feraient comme moi, ils poseraient un dernier regard sur ce qui en vaut encore la peine.

Je me croyais intouchable, là-haut, en fait j'étais déjà abîmé. Je croyais voir les gens tout en bas, en tout petit, alors qu'ils étaient à coté de moi ou au-dessus, plutôt au-dessus dans l'ensemble.

La mort c'était ça en plus vite et en plus con.

J'avais juste envie de me laisser glisser dans le noir.

Ils en finissaient pas de se connaître et au fur et à mesure que la nuit descendait, ils se rapprochaient l'un de l'autre, ils devenaient lumineux, oui, lumineux.

Une nuit, même, j'ai dit Mon Dieu, je vous en supplie, j'étais vraiment au bout du rouleau, je songeais même pas à me tuer, j'avais plus cette force qui vous monte de l'intérieur pour les gros coups.

C'était vraiment très beau, je la regardais sortir du monde, comme une petite fille qui passe par la fenêtre du jardin et c'était moi qui avais ouvert, je pouvais profiter du parfum.

Chacun portait sa croix, ici-bas, et j'avais changé d'épaule pour un moment.

Après tout, peut-être qu'elles avaient raison, peut-être qu'on se faisait des idées, simplement, elles laissaient notre petite vanité tranquille et l'illusion menait le monde, elles avaient toujours une poignée de poudre à nous balancer dans les yeux et laissez-moi vous dire, en ce qui concerne Dieu, je crois bien que les mecs qui montaient là-haut devaient avoir une drôle de surprise, les Chinois avaient presque compris ça, le yin et le yang, sauf que le yin, le froid, le sombre, le féminin, ça balayait tout le reste, regardez un peu autour de vous, réfléchissez un peu. Le seul truc à faire, c'était de pas trop leur montrer, ça pouvait encore nous sauver un petit bout de temps et la veine qu'on avait, c'est qu'elles étaient pas pressées.

Je connaissais les limites entre la vérité et le mensonge et je savais qu'on pouvait pas aller plus loin avec les gens, c'était déjà beau.

Y avait qu'à voir comment marchait le monde, la saloperie, voilà, rien que des coups bas dans le silence et la solitude de votre âme déglinguée.

Parfois, les gens s'imaginent que le Dieu les a frôlés du dos de la main. Ca les rend encore plus cinglés et encore un peu plus perdus.

Il en fallait beaucoup pour transformer un homme, le monde tenait à pas grand-chose, le monde marchait au bluff, ceux qui essayaient de faire croire et ceux qui y croyaient, les derniers étant les plus dangereux.

Plus je dégringolais, plus je me sentais fort, sans boire, sans faire le malin, dans le silence et attendre, un mec vissé sur ma chaise, le jour, la nuit, merde la vie est tellement effrayante qu'il faut se cramponner.

L'autre avait pas encore le vertige, il savait pas comme c'était bon.

Il avait pris un peu de ma vie, et ce qu'il en avait fait, peut-être qu'il s'en rendait même pas compte. Y a tout un tas d'idées qui amènent à ça.

Ouais, au bout y a la tristesse mais je pense tellement à la Mort, je pleure si souvent qu'un peu de sueur et deux trois mots, même si j'y comprends rien, c'est un peu comme des ongles qui poussent et qui freinent la dégringolade.

Les gens sont des machines à enregistrer le monde.

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